Témoignage d'un patient ayant reçu du Trikafta. On notera au passage qu'aller en Géorgie pour faire de la phagotherapie n'était pas forcément une bonne idée :-(
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Atteint de la mucoviscidose, Elliot, originaire de Nantes et âgé de 25 ans, bénéficie à titre dérogatoire d’un traitement américain à l’efficacité inédite. Sa vie a radicalement changé et il envisage désormais plus sereinement son avenir.
Les séances de kiné quasi quotidiennes, les antibiotiques à la pelle et une gêne pulmonaire permanente, c’était le quotidien d’Elliot jusqu’au début de l’année 2020 et l’arrivée du Kaftrio® (plus connu sous son nom américain Trikafta®). Si ce nouveau traitement ne peut le guérir de la mucoviscidose, ses deux comprimés le matin, et un autre le soir, lui ont changé la vie.
Au début de l’année 2019, les antibiotiques font de moins en moins d’effets. Sur ce constat, il se résout à partir en Géorgie pour essayer la phagothérapie, un traitement expérimental : « Je n’étais pas assez atteint pour espérer une greffe pulmonaire, alors autant tenter… »
Mais de retour en France, aucune amélioration. Pire, son état s’aggrave et il doit être hospitalisé pour un pneumothorax. Une dégradation qui va finalement jouer en sa faveur.Sur proposition de son médecin, Elliot demande une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) pour bénéficier d’un nouveau traitement américain, le Kaftrio®. Cette ATU s’adresse aux patients âgés de 12 ans et plus, atteints de « mucoviscidose grave, engageant le pronostic vital à court ou moyen terme », comme l’indique l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
Son dossier est approuvé : « Finalement ça a été une chance pour moi d’être aussi malade », analyse le jeune homme qui s’amuse de cette fortune nouvelle : « Je suis né un 13 du mois et il y avait un trèfle sur mon faire-part de naissance, ça devait sourire un jour. »
« À l’hôpital on m’a dit : c’est dingue ! »
À Rennes où il réside, Elliot reçoit, en avril dernier, son premier colis mensuel des États-Unis. Dès les premiers jours de traitement, le changement est spectaculaire : « J’ai toussé toute ma vie et là, plus rien… Une semaine plus tard, j’avais pris trois kilos. » Il en prendra dix-sept autres en quelques mois. Et aujourd’hui, sa capacité pulmonaire a plus que doublé : « À l’hôpital on m’a dit :
c’est dingue ! »
« On constate une amélioration globale de la qualité de vie des patients, souligne Paola De Carli qui a pu suivre une partie des quelque 200 Français qui ont bénéficié d’une ATU pour ce traitement. Certains ont repris le sport, il y a même eu des grossesses. »
Si Elliot ne prévoit pas de fonder une famille dans l’immédiat, ses perspectives sont toutes autres désormais : « J’avais du mal à me projeter, maintenant je fais des projets. »
Ce traitement, parfois présenté comme « révolutionnaire », n’est pas le premier à agir sur les causes plutôt que les symptômes. En effet, trois autres traitements sont à même de corriger le gène codant la protéine dont la mutation, ou l’absence, est responsable « par un effet cascade » de la mucoviscidose.Mais le Kaftrio® diffère par « son efficacité et la part importante des malades qui peuvent en bénéficier (environ 80 % selon leur profil génétique) », précise Paola De Carli.
Espoir et frustration :
Des caractéristiques qui nourrissent un immense espoir, et autant de frustration. Parmi les 6 000 personnes atteintes de la mucoviscidose en France, la majorité n’est pas atteinte d’une forme suffisamment grave pour prétendre à une ATU. « Une patiente me disait qu’elle avait l’impression de rouler en Twingo alors qu’elle pourrait rouler en Porsche », rapporte Paola De Carli.
Il ne leur reste qu’à attendre l’arrivée du Kaftrio® dans les officines françaises, mais s’il a bien reçu son autorisation de mise sur le marché, la Haute autorité de santé (HAS) doit encore évaluer l’amélioration du service médical rendu (ASMR).
275 000 € par an :
La note produite servira alors de base aux négociations entre l’organisme payeur et le laboratoire Vertex Pharmaceuticals qui produit Kaftrio®. Celles-ci s’annoncent ardues : aux États-Unis, le traitement est facturé environ 275 000 € par patient et par an et la capacité des organismes payeurs à assumer le coût de ces thérapies d’un nouveau genre est de plus en plus questionnée.Une situation qui pèse forcément sur les malades pour qui l’attente est parfois insoutenable : « On a des patients qui laissent volontairement leur état se dégrader pour bénéficier du traitement », alerte Paola De Carli. En France, l’espérance de vie d’un malade de la mucoviscidose était de 5 ans dans les années 1960, elle est aujourd’hui de 40 ans en moyenne.
Muco breton de 53 ans - Greffé bi-pulmonaire le 26 Mars 2014